Pourquoi adopter le laboratoire vivant comme démarche d’innovation communautaire et territoriale ?
À l’échelle locale, les communautés sont depuis longtemps confrontées à des problématiques complexes concernant la préservation des milieux de vie, tant sur des aspects écologiques que sociétaux. De multiples intérêts divergents opèrent sur un même territoire et engendrent des enjeux distincts que subit l’ensemble des membres de cette communauté, au point de les décourager à agir. Or, les défis socio-environnementaux qui nous attendent ne seront relevés qu’en passant à l’action et en adaptant nos comportements. Alors, quelle méthode choisir pour innover collectivement de manière efficace sur le long terme ? En préparation de sa nouvelle formation, la MIS met en avant la démarche des laboratoires vivants et ses processus de cocréation propices à l’innovation communautaire et territoriale.
L’innovation par et pour les usagers
Émergée à la fin des années 1990 aux États-Unis puis développée en Europe à partir de 2006, la démarche des Living Labs, ou laboratoires vivants, se distingue par un nouveau dispositif pour innover dans lequel les usagers ne sont désormais plus vus comme un objet d’investigation, mais comme des acteurs et actrices clés dans le processus d’innovation.
Pour y parvenir, le laboratoire vivant rassemble une coalition de partenaires diversifiés, idéalement publics, privés et citoyens. Ils ont en commun une intention, des valeurs, une volonté d’innovation autour d’un enjeu collectif, ainsi qu’une vision de collaboration, notamment dans le partage des ressources et des apprentissages.
En s’appuyant sur des méthodes centrées sur les usagers, cette coalition se met en place autour de la problématique qu’elle souhaite adresser, qui peut être de nature environnementale, sociale, technologique, etc. Si l’on parle d’un laboratoire vivant territorial, le travail va également se concentrer sur les enjeux du territoire : une ville, un village, un quartier, un bassin versant ou toute zone délimitée géographiquement.
L’approche du laboratoire vivant
Différents leviers sont activés dans une démarche de laboratoire vivant, avec chacun leurs caractéristiques et leur valeur ajoutée :
- La coalition de partenaires, qui agit comme dispositif d’intermédiation entre toutes les parties prenantes malgré leurs natures différentes, leurs intérêts divergents voire leur compréhension distincte de la problématique. Ces dernières se réunissent néanmoins autour d’un besoin commun d’innovation dans la communauté dans laquelle elles sont ancrées. La coalition permet de créer des liens entre des acteurs et des actrices qui n’existaient pas forcément auparavant et d’autonomiser les partenaires du territoire, assurant la pérennité du projet.
- L’écosystème de cocréation dans lequel sont mixés tout type de savoirs : informels, militants, expérientiels, académiques, etc., dont la valeur contribue à adresser la complexité du problème. Ils facilitent l’innovation, enracinent la culture ainsi que la recherche de solutions selon les spécificités du territoire.
- Le coportage par les usagers favorise l’adoption, qui est l’un des objectifs du laboratoire vivant. Sans adoption, pas d’innovation. En plaçant les personnes concernées par la problématique au centre du processus, le passage à l’action est facilité, car les bénéficiaires adoptent une posture active plutôt que passive. Celle-ci est propice aux transferts d’apprentissage et donc vectrice de changement de comportements.
- L’expérimentation en conditions réelles facilite les itérations, contribue à changer les préconceptions par la pratique et permet de réinjecter les apprentissages propres aux spécificités du territoire. Les risques sont ainsi limités à chaque étape de l’expérimentation.
Virginie Zingraff
Les conditions gagnantes du dispositif du laboratoire vivant
Malgré des avantages indéniables, la mise en place d’un laboratoire vivant requiert des investissements considérables en temps et en ressources. Il demande aussi un certain nombre de conditions préalables parmi les actifs du territoire ou du secteur auquel il s’intéresse et l’engagement des parties prenantes dans une posture de collaboration et de créativité très différente de celle de la concertation traditionnelle. La décision de démarrer un projet de laboratoire vivant doit donc s’appuyer sur une réflexion justifiant le choix de ce type de modèle parmi d’autres processus d’innovation ou approches centrées sur les usagers.
« Il existe une diversité de dispositifs permettant d’innover ou de collaborer avec des usagers, certains pouvant se déployer relativement rapidement et ponctuellement. Si on se place dans une approche de changement systémique, le laboratoire vivant a cet avantage de pouvoir se déployer sur le très long terme et d’accueillir une façon continue d’innover entre parties prenantes diversifiées au sein d’une même communauté. Ces deux éléments distinctifs des laboratoires vivants demandent en contre-partie des pratiques de gouvernance, de gestion et d’animation spécifiques. » — Virginie Zingraff, Conseillère principale – Leadership de pratique et transfert
Après la validation du laboratoire vivant comme choix du modèle d’innovation vient la mise en place du dispositif. Cette étape est cruciale, car le succès d’un laboratoire vivant dépend de la qualité de sa constitution, une étape d’amorce qui nécessite souvent un soutien et qui est basée sur l’identification des actifs et des parties prenantes de son écosystème.
« Les choix initiaux sont déterminants. Parmi les apprentissages que nous avons faits en collaborant avec différents laboratoires vivants, comme l’AcadieLab ou le CRIUGM, la capacité de faire intervenir et collaborer les bonnes expertises et à évaluer et faire évoluer les liens de confiance entre les parties prenantes est essentielle. Plus encore, la réussite à long terme et la crédibilité d’un laboratoire vivant dépendront de l’alignement des choix stratégiques et méthodologiques, avec la nature de l’innovation et les impacts recherchés par le laboratoire vivant. La phase de structuration est donc déterminante pour la suite et c’est pourquoi la MIS, qui se spécialise notamment dans le soutien en phase d’amorçage de projets d’innovation, est à préparer une formation d’initiation aux laboratoires vivants qui sera accompagnée, au courant de l’année 2022, par la publication d’un guide complet d’implantation d’un laboratoire vivant à l’échelle territoriale ou d’une communauté. » — Virginie Zingraff
Vous souhaitez évaluer la pertinence de lancer un laboratoire vivant pour adresser un enjeu complexe sur votre territoire ? Vous souhaitez être accompagnés pour mettre en place ce dispositif sur de bonnes bases et acquérir les compétences clés pour le mener à bien? Communiquez avec nous!
Visionnez le webinaire sur l’innovation communautaire et territoriale auquel notre directeur de l’entrepreneuriat social Hugo Steben a participé, en partenariat avec Jean-François Jasmin du LLio et Myriam Bérubé de l’Institut Tamarack.